GUIDE SUR LES PROCEDURES JUDICIAIRES EN MATIERE ADMINISTRATIVE

Préliminaires

L’administration est l’ensemble des services de l’Etat, c’est l’instrument de préparation et d’exécution des options gouvernementales. En cela, c’est un organe structuré horizontalement et verticalement de manière hiérarchique à l’image de L’État lui-même pour répondre aux règles de déconcentration et de déconcentration nécessaire à l’efficacité de sa mission. En vue de l’exécution de cette mission, elle exerce directement ou par l’intermédiaire de partenaires, deux sortes d’activités : une activité (telle assurer la santé la sécurité l’éducation, l’eau etc.) et une activité juridique.

L’activité juridique qui est fait état  tend à modifier l’ordonnancement  juridique existant, soit à créer des droits ou des obligations à l’encontre des administrés. Cette activité juridique  est exercée dans le cadre de la réalisation de l’activité matérielle ci-dessus orientée et toutes ces deux sortes d’activités peuvent faire l’objet d’un contrôle juridictionnel.

En règle générale, le recours contentieux, pour pouvoir être examiné au fond par la juridiction saisie, doit remplir des conditions de forme. L’examen de ces conditions de forme qui tiennent à la recevabilité du recours, doit lui-même être précédé de la détermination de la juridiction compétente. En tout état de cause, c’est au cours du déroulement de l’instance préparatoire de la décision à intervenir que la procédure contentieuse révèle tous ces caractères.

Introduction

 Des juridictions administratives au Burkina Faso

Il en existe trois :

-Le Conseil D’État qui est la juridiction supérieure de l’ordre administratif. C’est la loi organique 015-2000/AN du 23 mai 2000 qui en précise la composition, l’organisation, les attributions et le fonctionnement et la procédure  applicable devant lui.

-La Cour administrative d’appel objet de la loi n°10-2106 du 26 avril 2016 portant création, attribution, fonctionnement et procédure applicable devant elle.

Les tribunaux administratifs institués par la loi n°11-2016 du 26 avril 2016 portant création, attribution, fonctionnement et procédure applicable devant eux.

  1.  Compétence matérielle de la juridiction saisie

Le contentieux administratif est un procès fait à un acte administratif. On ne peut recourir contre l’administration qu’en produisant un acte émanant de celle-ci et les juridictions administrative burkinabè ne sont compétentes que pour connaître des actes des autorités administratives burkinabè. L’acte susceptible de recours est un acte unilatéral, réglementaire ou individuel, à caractère décisionnel. Il doit exister matériellement et juridiquement surtout pour pouvoir être remis en cause ; C’est la règle de la décision administrative préalable liant le contentieux. Si cette décision  n’existe pas il faut en provoquer la création.

Les différentes décisions susceptibles de recours doivent faire grief dans le cas  du recours pour excès de pouvoir (Il se définit comme étant le recours par lequel on demande au juge l’annulation d’une décision administrative en raison de l’irrégularité ou de l’illégalité dont elle serait entachée) ou léser des intérêts dans le cas du plein contentieux (Le recours de plein contentieux est le recours par lequel un justiciable demande au juge administratif de reconnaître à son profit l’existence d’un droit, de constater que l’administration a porté irrégulièrement atteinte à ce droit et de la condamner à réparer le préjudice causé par l’allocation de dommages et intérêts). La compétence des juridictions administratives se détermine en fonction de ces décisions.

I-1 : Le conseil D’État en sa chambre  du contentieux est compétent pour connaître en premier et dernier ressort par voie de recours pour excès de pouvoir, du contentieux des actes émanant de la plus haute hiérarchie de l’exécutif à savoir les décrets mais aussi des actes administratifs à effet excédant le ressort territorial d’un seul tribunal administratif comme un arrêté ministériel fixant les conditions d’un concours national ou les résultats de ce concours.

Il est compétent également pour connaître :

-Des recours en interprétation ou en appréciation de légalité de ces actes ;

-En appel, des décisions rendues en premier ressort par les tribunaux administratifs dans tous les cas où la loi n’en dispose pas autrement ;

-En cassation des décisions rendues en dernier ressort par les tribunaux administratifs.

I-2 : La Cour administrative d’appel connaît des recours contre les jugements rendus en premier ressort par les tribunaux administratifs.

I-3 : Le tribunal administratif est juge de droit commun du contentieux administratif. Sauf dans les cas déterminés par la loi, il statue en premier ressort à charge d’appel devant la Cour administrative d’appel.

Le tribunal administratif connait en outre des recours en interprétation ou en appréciation de la légalité des actes administratifs dont le contentieux relève de sa compétence.

Le tribunal administratif compétent pour connaître d’une demande principale, l’est également pour connaître de toute demande accessoire, incidente ou reconventionnelle ressortissant à la compétence des tribunaux administratifs.

Il est également compétent pour connaître des exceptions de la compétence de la juridiction administrative.

  1.  Compétence territoriale de la juridiction saisie

II-1 : La compétence territoriale du Conseil d’Etat est nationale.

II-2 : Il est créé au siège de chaque Cour d’appel de l’ordre judiciaire, une Cour administrative d’appel.

Son ressort territorial est celui de la Cour d’appel de l’ordre judiciaire.

La Cour administrative d’appel est la juridiction de second degré de l’ordre administratif.

 II-3 : Il est créé au chef-lieu de chaque province, un tribunal administratif. Son ressort territorial est la province.

Le tribunal administratif est la juridiction de premier degré de l’ordre administratif.

  1. Les recours
  1.  de la recevabilité de la requête ou recours contentieux

La recevabilité d’un recours tient à des conditions qui sont relatives à la nature de l’acte attaqué, à la présentation du recours ou requête, au requérant.

De la nature de l’acte administratif mis en cause :

Toutes les activités ou tous les actes administratifs ne sont justiciables des juridictions administratives.

Sont par principe exclus du contrôle des juridictions administratives par voie de recours pour excès de pouvoir (ne sont donc pas annulables) :

1 : les actes extra-administratifs tels que les lois (acte législatif), les actes de gouvernement que sont : les actes concernant les relations entre le gouvernement et l’assemblée nationale, les relations internationales et les actes de guerre.

-2 : les actes infra-administratifs que sont les actes préparatoires des décisions administratives, les actes d’exécution, de notification, de constatation ou de confirmation, les mesures internes d’organisation du travail, les circulaires et directives qui sont des mesures interprétatives ou explicatives, à condition de ne pas modifier la décision qu’elles sont censées interpréter ou expliquer.

-3 : Sont exclus de la connaissance des juridictions administratives nationales, les actes des autorités administratives étrangères.

-4 : Sont également exclus de la compétence des juridictions administratives les activités ou leurs conséquences pouvant engager la responsabilité de l’Etat comme les accidents de la circulation causés par les véhicules de l’Etat, les contrats de droit privé, le contentieux entre les établissements publics à caractère industriel et leurs clients (Sonabel, Onea, onatel).

B-  Conditions relatives au recours

Elles concernent d’une part, la forme et le contenu de la requête et d’autre part, le délai de présentation de la requête.

1- De la forme et du contenu du recours ou de la requête

Le tribunal administratif doit être  est saisi par voie de requête écrite déposée au greffe du tribunal.

La Cour administrative d’appel est saisie par voie de requête à fin d’appel écrite déposée au greffe de la cour.

Le Conseil d’Etat est saisi par requête écrite (pourvoi)  déposée au greffe de la cour.

Elle peut être adressée en franchise au président de la Cour ou au greffier en  chef, chef de greffe

La requête doit indiquer clairement l’adresse des parties, ce qui permettra de les joindre en temps opportun et rédigée en français.

Les requêtes et en général, toutes les productions des parties sont inscrites à leur arrivée sur le registre d’ordre qui est tenu par le greffier en chef, chef de greffe ; elles sont en outre marquées ainsi que les pièces qui y sont jointes d’un timbre indiquant la date d’arrivée.

Les requêtes doivent être produites en autant d’exemplaires qu’il y a de parties en cause. Les copies ne sont pas assujetties au droit de timbre.

Le recours contre une décision administrative n’a pas d’effet suspensif s’il n’en est autrement ordonné sur demande expresse d’une partie.

Une requête doit avoir un objet pour permettre au juge de déterminer sa compétence, apprécier sa recevabilité ou vérifier la procédure applicable et pour permettre au défendeur de faire valoir ses arguments.

Elle devra à peine d’irrecevabilité :

– contenir indiquer les noms, prénoms ou raison sociale et domicile des parties;

– contenir un exposé sommaire des faits, moyens et conclusions ;

– être accompagnée de la copie de la décision administrative attaquée et éventuellement de l’extrait d’une décision juridictionnelle ou d’une pièce justifiant du dépôt de la réclamation.

2-  Du délai de présentation de la requête

Devant le Tribunal administratif

Le recours au tribunal administratif contre la décision d’une autorité administrative est recevable dans un délai de deux mois. Ce délai court à partir de la date de la notification ou de la signification, ou de la date de la publication de la décision attaquée.

L’acte de notification ou de signification doit contenir la mention du délai de recours. A défaut, l’administration ne peut se prévaloir de la forclusion.

Dans les affaires contentieuses qui ne peuvent être introduites que sous forme de requête contre une décision administrative, lorsqu’un délai de deux mois s’est écoulé depuis la demande sans qu’aucune décision administrative ne soit intervenue, les parties intéressées doivent la considérer comme rejetée ; elles peuvent dès lors saisir le tribunal administratif dans les deux mois qui suivent l’expiration du délai de deux mois.

Le recours gracieux ou hiérarchique contre une décision explicite de rejet suspend, s’il ne s’est écoulé, le délai du recours contentieux, mais ne peut avoir cet effet qu’une fois.

En outre, après le recours gracieux, les recours hiérarchiques introduits auprès des autorités supérieures successives suspendent les délais du recours contentieux au bénéfice du recourant.

Devant la Cour administrative d’appel :

Le recours à la Cour administrative d’appel contre un jugement contradictoire ou réputé tel n’est recevable que dans un délai de deux mois.

Ce délai court à compter du prononcé du jugement contradictoire ou de la date de la notification ou de la signification de la décision réputée contradictoire.

Devant le Conseil D’État :

Le recours au Conseil D’État contre a décision d’une autorité administrative n’est recevable que dans un délai de deux (02) mois ; ce délai court de la date de la notification ou de la signification ou de la date de publication de la décision attaquée.

Dans les affaires contentieuses qui ne peuvent être introduites que sous la forme d’une requête contre une décision administrative, lorsqu’un délai de quatre mois (04) s’est écoulé depuis la demande sans qu’aucune décision ne soit intervenue, les parties doivent la considérer comme rejetée et peuvent se pourvoir devant le Conseil D’État dans les deux (02) mois qui suivent le jour de l’expiration du délai de quatre mois.

Si l’autorité administrative est un corps délibérant, le délai de quatre mois est prorogé, le cas échéant de la première session qui suivra le dépôt de la demande.

Les recours gracieux ou hiérarchiques contre la décision explicite de rejet, ou le recours hiérarchique contre la décision implicite de rejet suspendent, s’il ne s’est écoulé, le délai du recours contentieux, mais ne peuvent avoir cet effet qu’une seule fois.

  1.  Conditions relatives au requérant

Toute personne désirant intenter un recours contre l’administration doit, avoir la qualité pour agir et doit aussi justifier d’un intérêt à agir.

  1.  la qualité pour agir

Pour déterminer si la personne qui introduit le recours a la qualité pour agir, le juge définit de la même manière qu’en droit privé.

En vertu du principe général de droit applicable aux personnes, le recourant doit avoir la capacité juridique pour ester. Ainsi :

Pour les personnes physiques, les mineurs et les majeurs incapables devront être représentés par leurs représentants légaux à peine d’irrecevabilité de leur requête.

Pour les personnes morales, lorsqu’une requête émane d’une personne  de droit privé (association, groupement, syndicat, fondation) son représentant légal doit justifier de son pouvoir. Lorsque cette requête émane d’une personne morale de droit public, son représentant légal doit produire l’autorisation administrative l’habilitant à agir.

La question de capacité d’agir est un moyen d’ordre public, la sanction de sa carence est l’irrecevabilité de la requête.

  •   L’intérêt à agir

Il est de principe que seule la victime d’une activité administrative (personne physique ou morale) qui puisse recourir en justice en faisant la preuve du lien de causalité entre cette activité et le grief ou le dommage qui en résulte pour elle. Ainsi, nul ne peut attaquer une décision administrative que s’il y a personnellement intérêt. Dans cette limite, on distingue l’intérêt individuel de l’intérêt collectif.

L’intérêt individuel : toute personne qui introduit un recours doit avoir un intérêt personnel à la solution du litige. Le requérant doit précisément, justifier que la décision attaquée est susceptible de lui faire grief dans ses intérêts personnels.

-cet intérêt peut être matériel ou moral

-cet intérêt de plus, être certain ; c’est-à-dire que l’acte attaqué doit causer un véritable trouble au requérant.

Les conséquences sont les suivantes :

  • L’agent ne peut pas attaquer les mesures négatives prises contre un autre agent appartenant à son corps.
  • L’agent ne peut davantage attaquer un acte positif pris en faveur d’un fonctionnaire n’appartenant pas au même corps que lui.

L’intérêt collectif : dans quelle mesure les personnes morales peuvent-elles justifier d’un intérêt à agir ?

Pour les organisations professionnelles, c’est-à-dire les syndicats le code du travail prévoit que « les syndicats peuvent exercer devant toutes juridictions tous les droits réservés à la partie civile relatifs aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent ».

Dans le cas précis du recours pour excès de pourvoir, les syndicats ou groupement professionnels peuvent se pourvoir devant la juridiction administrative  contre les actes réglementaires concernant le statut  du personnel.  De même, les groupements professionnels peuvent se pourvoir contre les décisions individuelles positives prise en faveur de l’un  ou plusieurs membres dans la mesure où ces décisions sont susceptibles d’affecter l’intérêt collectif.

En revanche, ils ne sont pas autorisés à attaquer les mesures individuelles négatives (sanction). C’est aux personnes destinataires de ces mesures de les attaquer en recours pour excès de pouvoir quitte pour le groupement à intervenir en soutien  ou en vertu d’un mandat « ad litem ».

  •  Du déroulement de l’instance

Il comprend l’instance elle-même qui va de la réception de la requête par le rapporteur (Président de chambre ou conseiller au Conseil d’Etat ; Président de chambre ou conseiller rapporteur à la cour administrative d’appel ; président du Tribunal administratif) jusqu’au déroulement de l’audience en passant par l’instruction de la requête. Des incidents peuvent survenir son déroulement.

  1.  De l’instruction de la requête

Elle se fait  avant ou pendant l’audience et avec une légère  différence suivant la juridiction.

-1 : Avant l’audience

Devant le Tribunal administratif

Après l’enregistrement au greffe, le dossier est immédiatement transmis par voie administrative au président du tribunal administratif qui fixe dans les huit (08) jours de sa réception, le délai accordé aux parties pour fournir leur défense. Notification leur est faite par le greffier en chef en la forme administrative.

Si une des formalités indispensables (exposé sommaire des faits, copie de la décision administrative) n’est pas remplie ou est insuffisamment remplie, la requête est enregistrée à sa date sur le registre d’ordre.

Toutefois, le président du tribunal fait mettre en demeure le requérant de compléter ou de préciser sa requête dans un délai qu’il fixe et qui ne peut être inférieur à un (01) mois.

Lorsque les parties défenderesses ou mises en cause ont produit leurs défenses ou lorsque le délai qui leur a été imparti a expiré ou encore lorsque les mesures d’instruction prescrites ont été exécutées, le président prend une ordonnance de clôture mettant fin à l’instruction. Cette ordonnance est notifiée aux parties et ne peut faire l’objet d’aucun recours.

Le dossier est ensuite communiqué au commissaire du gouvernement pour ses conclusions écrites qui le retournera au Président du Tribunal pour inscription au rôle d’audience dès qu’il aura fini lesdites conclusions et les parties sont avisées de la date de l’audience par le greffier en chef par avertissement en la forme administrative.

Devant la Cour administrative d’appel

Dès qu’un président de chambre reçoit du président de la Cour une requête enregistrée au greffe, il désigne un conseiller rapporteur.

Ce dernier fait communiquer aux parties mises en cause, par le greffier, la requête et les pièces l’accompagnant aux parties mises en cause.

Celles-ci sont en même temps mises en demeure de présenter leurs moyens de défense dans le délai fixé par le conseiller rapporteur

Lorsque les parties défenderesses ou mises en cause ont produit leurs défenses ou lorsque le délai qui leur a été imparti a expiré, ou encore lorsque les mesures d’instruction prescrites ont été exécutées, le conseiller rapporteur établit un rapport et prend une ordonnance de clôture mettant fin à l’instruction.

Cette ordonnance est notifiée aux parties et ne peut faire l’objet d’aucun recours.

Le dossier est ensuite communiqué par la voie hiérarchique au commissaire du gouvernement pour ses conclusions écrites.

Le commissaire du gouvernement transmet le dossier contenant ses conclusions au président de la Cour pour inscription au rôle d’audience.

Dès inscription du dossier au rôle d’audience par le président de la Cour administrative d’appel ou le président de chambre, les parties sont avisées de la date de l’audience par le greffier en chef, au moins quinze (15) jours avant la date fixée. Elles sont également avisées qu’elles pourront y présenter des observations.

Devant le Conseil D’État

Dès qu’il constate qu’une requête est régulièrement enregistrée et présentée, le président de chambre désigne un conseiller rapporteur.

Celui-ci fait communiquer par le greffe, la requête et les pièces l’accompagnant aux parties mises en cause. Cette communication est faite par la voie administrative.

Les parties mises en cause sont en même temps mises en demeure de présenter leur défense dans le délai fixé par le rapporteur et d’élire domicile.

Le conseiller rapporteur procède à toutes mesures d’instruction qui ne préjugent pas au fond. La participation des parties aux mesures d’instruction prescrites dans ces conditions ne les prive pas du droit de proposer devant le Conseil D’État, tous les moyens et exceptions qu’elles jugent utiles.

En réalité, après le rapport, le dossier est transmis par la voie administrative au Commissaire du Gouvernement pour ses conclusions écrites ; le dossier n’est en état de recevoir jugement que lorsque le Commissaire du Gouvernement le renvoie en la forme administrative avec ses conclusions.

La charge de la preuve des faits allégués incombe en principe au demandeur, mais le juge peut renverser cette charge lorsque les allégations du demandeur sont suffisamment précises et vraisemblables (ex. le demandeur se prévaut d’une décision administrative qu’il ne peut produire parce qu’étant toujours détenue par l’administration) en invitant l’administration à produire les preuves utiles à la solution du litige et qu’elle détient ; elle peut même être invitée à faire connaître les motifs de la décision.

 2-  A l’audience

Devant le Tribunal administratif,  le président, lorsqu’il le juge nécessaire,  peut ordonner toutes mesures complémentaires d’instruction et y procéder dans les formes prescrites par la décision qui les ordonne.

Devant la Cour administrative d’appel

La Cour peut ordonner soit d’office, soit à la demande des parties, toutes mesures d’instruction utiles.

Il y est alors procédé soit devant la cour, soit par un conseiller désigné à cet effet qui instruit dans les formes prescrites par la décision ordonnant lesdites mesures.

Le Président de la chambre contentieuse du Conseil D’État peut également ordonner d’office ou à la demande des parties toutes mesures d’instruction devant la chambre ou par un conseiller désigné à cet effet dans les formes prescrites par la décision.

Les mesures d’instruction ordonnées à l’audience sont généralement des expertises, des vérifications d’écriture, d’authenticité, d’enquête, de visite des lieux, des commissions rogatoires.

B-  Des incidents de procédure

En dépit du caractère contraire de la procédure administrative, des incidents peuvent émailler le déroulement normal de la procédure et à ce titre, il y a les demandes incidentes, les incidents interruptifs d’instance et les incidents interruptifs d’instance.

1- Les demandes incidentes

Il s’agit des demandes reconventionnelles et l’intervention

  •  La demande reconventionnelle

C’est une requête introduite par le défendeur en réponse à une précédente  requête formulée contre elle dans le cadre d’un recours de plein contentieux (elle n’est pas admise en matière de recours pour excès de pouvoir qui ne vise qu’à obtenir l’annulation de l’acte administratif). Cette demande doit se limiter à l’objet du contentieux principal dont elle subit du reste le sort ; ainsi si l’action principale est irrecevable, il ne peut être statué sur la demande reconventionnelle de même qu’il ne pourra être statué sur cette demande reconventionnelle en cas de désistement du demandeur accepté par le défendeur. En principe elle peut être introduite sans condition de délai mais devrait l’être au plus tard à la première audience à laquelle les parties sont convoquées.

  •  L’intervention

Il y a intervention  lorsqu’une tierce personne estime avoir un intérêt  dans un procès dans lequel elle n’est ni demanderesse ni défenderesse à priori ou lorsqu’une des parties au procès estime qu’elle a intérêt à ce qu’une tierce personne au procès y soit néanmoins attraite. Elle peut être volontaire ou forcée.

Lorsqu’elle est volontaire (l’intervenant qui a intérêt au maintien ou à son annulation s’agissant d’un recours pour excès de pouvoir ou lorsqu’en matière de plein contentieux, la décision mise en cause est susceptible d’affecter ses intérêts peut se joindre à l’instance), elle est participative ou accessoire.

-Lorsqu’elle est forcée (à la demande d’une partie, le juge peut ordonner l’intervention d’un tiers), elle se fait par la mise en cause de ce tiers par le demandeur et est usitée dans le contentieux de la responsabilité, l’appel en garantie par le défendeur et l’appel en déclaration de jugement commun.

2-  Les incidents interruptifs d’instance

Ce sont la question préjudicielle, l’inscription de faux, le décès d’une partie et le sursis à exécution

  •  De la question préjudicielle

La question préjudicielle est une question de droit qui, soulevée devant une juridiction, oblige celle-ci à surseoir à statuer jusqu’ à ce qu’elle soit tranchée par la juridiction compétente ; elle est soulevée par les parties.

Lorsqu’une question préjudicielle est soulevée devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d’appel, celui-ci doit surseoir à statuer et renvoyer la partie intéressée à se pourvoir devant la juridiction compétente dans un délai qu’il fixe.

Si à l’expiration du délai fixé, la partie ne fait pas diligence, le tribunal peut statuer en écartant la question préjudicielle.

  •  De l’inscription de faux

Elle consiste à contester la régularité d’une pièce produite par l’autre partie et qui semble être la base légale de l’acte objet du recours principal ? S’il venait à être soulevé, le Président de la juridiction saisie, dans un délai qu’il fixe, fait mettre en demeure la partie qui l’a produite de déclarer si elle entend s’en servir ? Deux situations peuvent alors de présenter à l’expiration du délai :

  • Il n’y a pas de réponse ou la partie mise en demeure déclare renoncer à se servir de cette pièce ; celle-ci est alors écartée des débats.
  • La partie mise en demeure déclare vouloir se servir de cette pièce, alors la juridiction saisie pourra ordonner qu’il soit sursis à statuer au fond jusqu’après le jugement de faux par la juridiction compétente, soit prononcera la décision définitive si celle-ci ne dépend pas de la pièce arguée de faux.
  • Du décès d’une partie

En cas de décès d’une partie, l’instance est suspendue pendant un mois pour permettre à ses ayants droit de la reprendre. Si à l’expiration de ce délai ils n’y ont pas pourvu, il est proposé par le rapporteur un administrateur tuteur de ce défunt contre lequel la procédure pourra être suivie. Cette décision étant réputée par défaut contre le défunt, ses ayants droit pourront y faire opposition dans un délai de trois (03) mois de la signification par huissier de justice à la diligence des autres parties.

  • Du sursis à exécution

L’acte administratif bénéficie toujours de la présomption de légalité et sauf disposition législatives contraires, une requête n’a pas sur lui d’effet suspensif à moins d’introduction d’une procédure tendant à obtenir le sursis à exécution.

Le sursis à exécution est introduit sans condition de délai par une requête distincte de la principale mais ne peut être accordé qu’à la quadruple condition que :

  • Il  y ait urgence ;
  • L’acte attaqué n’intéresse pas le maintien de l’ordre, la sécurité, la tranquillité, la salubrité publiques
  • Les moyens invoqués à l’appui de la demande de sursis à exécution apparaissent sérieux ;
  • Le préjudice encouru par le requérant soit irréparable.

Ces quatre conditions sont cumulatives et non alternatives.

  •  Des incidents extinctifs d’instance
  • Le désistement

Il y a le désistement  lorsque le requérant renonce à sa requête. C’est une possibilité qui lui reste à tout instant, du moins, jusqu’à la clôture de l’instruction.

En principe, le désistement doit être formulé par un acte écrit traduisant la volonté non équivoque du requérant à renoncer à la poursuite de la procédure contre une décision administrative.

Le désistement se présente sous deux formes : le désistement d’action et le désistement d’instance.

le désistement d’action : c’est celui par lequel le requérant abandonne tout recours sur le même objet à l’égard du même adversaire. En l’absence de précision, tout désistement est considéré comme désistement d’action.

le désistement d’instance : c’est l’abandon de l’instance en cours avec la volonté exprimée de reprendre l’action sous d’autres formes ou devant une autre juridiction.

  •  L’acquiescement

l’acquiescement volontaire : c’est lorsque l’administration défenderesse reconnaît le bien-fondé des prétentions du défendeur et, par conséquent lui donne satisfaction. La requête devient sans objet.

l’acquiescement forcé : c’est le cas par exemple lorsque la défenderesse s’abstient de faire ses observations en défense à l’expiration du délai qui lui a été imparti pour ce faire par le rapporteur, sur mise en demeure préalable de la formation du jugement.

  •  Le non-lieu

Le non-lieu est prononcé lorsque l’objet de la requête disparait. C’est-à-dire qu’il n’y a plus rien à juger ou que les circonstances ne permettent plus de juger Le non-lieu peut être prononcé dans au moins deux hypothèses.

Ce peut être d’abord parce que l’objet de la requête a disparu

Ainsi dans le recours en annulation, le non-lieu est prononcé lorsque la décision attaquée a été rapportée par son auteur ou par son supérieur hiérarchique, ou annulé par une décision juridictionnelle devenue définitive.

Dans les recours de plein contentieux, il y a non-lieu si les conclusions du requérant ont été satisfaites par l’adversaire, par exemple par l’allocation d’une indemnité qui lui donne satisfaction.

Le juge peut être tenu de déclarer le non-lieu à statuer, lorsque l’acte attaqué a fait l’objet d’une validation législative ; c’est-à-dire qu’il a été transformé en loi et, pour cette raison, échappe à la compétence du juge administratif.

VI – Du déroulement de l’audience

L’audience est publique sauf en matière d’impôt et les contributions directes. Lorsque  l’instruction est close et lorsque le Commissaire du Gouvernement dépose ses conclusions, le Président du Tribunal administratif, de la Cour administrative d’appel ou de la chambre du contentieux du Conseil d’Etat en fixe une date ; les parties y sont conviées par voie règlementaire. Elles doivent en être informées au moins quinze (15) jours avant cette date.

  1.  Devant le Tribunal administratif

Le tribunal statue au vu des conclusions écrites du commissaire du gouvernement qui les développe oralement à l’audience.

Le Président n’est pas tenu de rédiger un rapport préalable. Dès qu’il aura déclaré l’audience ouverte, il introduira chaque affaire inscrite au rôle de ce jour.

A cet effet, le greffier tient notes des déclarations et réponses des parties au procès.

Pour chaque affaire, les parties ou leurs conseils ne sont autorisées à faire des observations orales sur les points qu’elles ont déjà développés dans leurs écritures parce que la procédure contentieuse est essentiellement écrite, l’intervention orale du Commissaire du Gouvernement sur le dossier met fin aux débats et l’affaire est mise en délibéré mais le Président peut estimer qu’il peut vider sa saisine sur le champ.

  •  Devant la cour administrative d’appel

Tout comme au niveau du Tribunal administratif, la Cour statue au vu du rapport du conseiller désigné et des conclusions écrites du commissaire du gouvernement qui les développe oralement à l’audience.

  •  Devant le Conseil d’Etat

Le conseiller désigné fait son rapport ; les parties présentent leurs observations orales. La chambre du contentieux statue sur le rapport du conseiller désigné et au vu des conclusions écrites du commissaire du gouvernement qui les développent oralement à l’audience.

Si le Commissaire du Gouvernement propose dans ses conclusions une solution du litige, le rapport est lu à l’audience pour permettre d’éventuels débats se content d’exposer les prétentions des parties  qu’; il invite la formation de jugement à apprécier l’affaire en la forme d’abord avant de se prononcer sur le fond. La solution du litige est proposée dans une note qui ne sera portée à la connaissance de la formation de jugement qu’au moment du délibéré. Après donc lecture du rapport, les parties sont invitées à y porter oralement leurs observations puis la parole est donnée au Commissaire du Gouvernement pour ses observations ou ses conclusions orales. L’affaire est alors mise en délibéré à une date que fixe la formation du jugement, date à laquelle elle videra sa saisine.

  •   De la décision à intervenir et des voies de recours
  •  De la décision

Il peut s’agir d’un acte préparatoire à la solution définitive du litige, dans ce cas on parle de décision avant dire droit (sursis à statuer ou à exécution, commission d’expertise), il pourra s’agir aussi de la solution du litige.

 La solution pouvant être une décision de rejet ou une décision d’annulation en matière de recours pour excès de pouvoir.

Dans les deux cas, se trouve posé le problème de l’autorité de la chose jugée.

En cas de décision de rejet, la décision du juge administratif n’a que l’autorité relative de la chose jugée.

En cas de décision d’annulation, l’acte administratif annulé est censé n’avoir jamais existé ; il apparaît en principe rétroactivement et  cette disparition s’impose à tous. C’est-à-dire que l’acte annulé ne peut en aucun cas être appliqué à qui que ce soit.

En matière de plein contentieux et surtout en matière de responsabilité, les décisions que peut prendre le juge au fond sont le rejet total ou partiel de la requête (comme étant mal fondée) ou la condamnation totale ou partielle de l’administration à payer les sommes demandées.

  •  Des voies de recours

On appelle voies de recours, les moyens dont dispose un justiciable contre la décision d’une juridiction. Les voies de recours retenues par la législation burkinabè en matière de contentieux administratif sont ; l’opposition, l’appel, la tierce opposition, la révision, le recours en rectification d’erreurs matérielles, le

  • L’appel

C’est la voie de recours contre une décision rendue contradictoirement ou réputée telle (c’est-à-dire que la personne contre laquelle elle a été rendue a pu faire faire valoir ses observations et moyens tant pendant la procédure d’instruction qu’au cours des débats) en premier ressort par les tribunaux administratifs. Il est porté devant la Cour administrative d’appel dans un délai  de deux mois du jour  du prononcé du jugement attaqué.

L’appel ne suspend pas l’exécution de la décision administrative attaquée à moins qu’il n’en soit ordonné autrement.

  • L’opposition

C’est la voie de recours contre toute décision rendue par défaut (lorsque la personne contre laquelle elle a ainsi été prononcée n’a pas été mise en demeure de présenter se moyens et observations pendant toute la procédure

L’opposition doit être formée dans le délai d’un mois à compter de la notification par voie d’huissier de justice ou en la forme administrative ou du jour où la partie contre qui défaut a été donné en a eu connaissance.

L’opposition ne suspend pas l’exécution de la décision administrative attaquée à moins qu’il n’en soit ordonné autrement.

Elle est exercée tant devant le tribunal administratif que devant la Cour administrative d’appel.

  • La tierce opposition

Toute personne peut former tierce opposition à une décision du tribunal administratif qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu’elle représente n’ont été présents ou régulièrement appelés dans l’instance ayant abouti à cette décision.

La tierce opposition doit être formée dans le délai d’un mois à compter du jour où l’intéressé a eu connaissance de la décision

Elle est exercée tant devant le tribunal administratif que devant la Cour administrative d’appel.

  • Le pourvoi en cassation

Les décisions rendues en premier et dernier ressort par le tribunal administratif ainsi que Les arrêts rendus contradictoirement ou par réputée contradictoire peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.

Le délai pour se pourvoir en cassation est de deux mois à compter du prononcé des décisions contradictoires ou de la date de la notification ou de la signification pour les arrêts réputés contradictoires.

Contre les décisions rendues par défaut, le délai court du jour où l’opposition n’est plus recevable.

  • La révision

Le recours en révision contre un arrêt de la Cour n’est recevable que si :

– il a été rendu sur fausses pièces ;

– la partie intéressée a été condamnée faute de présenter une pièce décisive qui était retenue par son adversaire.

Le recours en révision doit être présenté par ministère d’avocat devant le tribunal administratif, la Cour administrative d’appel  et le Conseil d’Etats qui a  rendu la décision en cause, dans les trois mois qui suivent la découverte du fait donnant ouverture à révision.

Lorsqu’il aura été statué sur un premier recours en révision contre une décision, un second recours contre la même décision n’est plus recevable.

  • Le recours en rectification d’erreurs matérielles

Lorsqu’une décision d’une juridiction administrative est entachée d’erreur matérielle susceptible d’exercer une influence sur cette décision, la partie intéressée pourra introduire auprès de cette juridiction, un recours en rectification.

 Ainsi, elle peut être exercée devant le tribunal administratif, la cour administrative d’appel et devant le Conseil d’Etat.

  • Le recours en interprétation

Lorsqu’une décision  paraît obscure ou lorsque dans son exécution elle se heurte à des difficultés d’exécution la partie diligente peut saisir la juridiction qui a rendu cette d’un recours en interprétation pour préciser le sens de sa décision.

En définitive au regard de tout ce qui précède, il apparaît que la procédure contentieuse en matière administrative revêt les caractères suivants :

-c’est une procédure écrite (la requête est toujours introduite par écrit par le requérant) ;

c’est une procédure contradictoire (la requête et les pièces qui l’accompagnent ainsi que les différents mémoires doivent être communiqués par le greffier ou le juge rapporteur aux différentes parties au procès pour leur permettre de préparer leur défense),

c’est une procédure inquisitoire (l’initiative de la mise en état du dossier n’appartient pas aux parties comme en matière civile ou commerciale) mais au juge rapporteur ou au Président,

c’est une procédure secrète (seules les parties au procès ou leurs conseils ont connaissance des éléments dont ils ont la charge de la production(le rapport du magistrat rapporteur et les conclusions écrites du Commissaire du Gouvernement ne sont pas communicables aux parties).

C’est une procédure non suspensive (l’acte attaqué continuera de produire ses effets jusqu’à la décision juridictionnelle à moins d’une demande de sursis à exécution qui aura été examinée favorablement ou d’intervention de la loi.