Déroulement d’une affaire devant le tribunal de commerce

I. COMPETENCES

Le tribunal de commerce est un tribunal chargé de juger les affaires en matière commerciale.

  1. compétence d’attribution

Le tribunal de commerce juge les  contestations entre commerçants ou entre particulier et commerçant  dont le montant de l’affaire est supérieur à300. 000 de franc CFA.

 Il faut préciser ici que si le demandeur n’a pas la qualité de commerçant, il a le choix entre le tribunal civil et le tribunal commercial ; mais si le défendeur n’a pas la qualité de commerçants le tribunal de commerce n’est pas compétent.

Les contestations relatives aux sociétés commerciales et aux groupements d’intérêt économique.

Il juge également  toutes les contestations  relatives aux actes  et effets de commerce entre toutes personnes ( chèque par exemple) tels que prévus par l’Acte uniforme relatif au droit commercial général.

Il est  également compétent pour juger les contestations relatives aux engagements et transactions entre commerçants, entre établissements de crédit ou entre commerçants et établissements de crédit dont le taux évalué en argent est supérieur à 300.000 F CFA.

Il connait aussi des procédures relatives aux entreprises en difficulté (procédures collectives d’apurement du passif).

  • Compétence territoriale

 Il est créé dans le ressort de chaque tribunal de grande instance un tribunal de commerce. Son ressort territorial est celui du tribunal de grande instance.

De nos jours, il existe deux tribunaux de commerce ; celui de Ouagadougou et celui de Bobo-Dioulasso.

Les tribunaux de  grande instance des autres villes conservent leur compétence en matière commerciale jusqu’à la mise en place effective des tribunaux de commerce.

Le tribunal compétent est celui  du domicile  du défendeur (votre adversaire). Si le litige porte sur un contrat, le tribunal compétent est aussi celui du lieu d’exécution du contrat (par exemple,  le lieu de la  livraison ou le lieu du paiement).

En matière de procédures relatives aux entreprises en difficulté, le tribunal compétent est celui du domicile du débiteur (celui dont l’entreprise est en difficulté).

II- Procédure devant le tribunal de commerce

A- Procédure ordinaire

Vous souhaitez trouver un accord avec votre adversaire

Vous et votre adversaire pouvez saisir ensemble le tribunal par  le dépôt au greffe d’une  requête conjointe (demande signée des deux parties) dans laquelle   le problème est exposé ;

La requête conjointe doit à peine d’irrecevabilité (sera rejetée) contenir les mentions suivantes :

-les indications relatives aux parties ;

Pour les personnes physiques (individus) : nom, prénom, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs :

Pour les personnes morales (sociétés, entreprises) : forme, dénomination, siège social et le représentant légal (Directeur Général, gérant).

-l’indication de la juridiction (tribunal)  devant laquelle la demande est portée ;

-l’indication des pièces (documents) sur lesquelles la demande est fondée ;

-la signature des parties.

Après saisine par voie d’assignation (à définir) les parties peuvent trouver un accord devant le juge de la mise en état ou le tribunal.

Les déclarations des parties sont exposées oralement devant le juge de la mise en état ou le tribunal qui dresse un procès-verbal de la conciliation qui vaut titre exécutoire, en cas d’accord.

Vous souhaitez faire homologuer  votre accord (faire reconnaitre votre accord par le juge)

Les parties doivent déposer une requête conjointe au secrétariat du président qui fait programmer le dossier à une audience. Les parties comparaissent  à l’audience et le tribunal après avoir vérifié que leur accord n’est pas contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs homologue  l’accord et ordonne l’apposition de la formule exécutoire par le greffier en chef du tribunal.

Vous ne pouvez pas ou ne voulez pas trouver un accord avec votre adversaire

Le tribunal de commerce peut être saisi par voie d’assignation  (l’assignation est un acte fait par un huissier). Le tribunal est saisi par l’une des parties ou par son avocat, par dépôt au greffe de l’orignal de l’assignation.  Le dépôt  doit être fait dans un délai de deux (02) mois à compter de l’assignation.  Le dépôt peut se faire  aussi par un huissier de  Justice.

L’assignation doit obligatoirement contenir outre les mentions prescrites pour les actes d’huissiers de Justice :

-l’indication du tribunal concerné ;

-l’objet de la demande avec un exposé de vos arguments ;

-les jour  et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée ;

– L’indication que le tribunal pourra statuer (rendre une décision) même en cas  d’absence du défendeur ;

– L’indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée ;

– La constitution d’avocat s’il y a lieu.

Elle doit être signifiée au défendeur.

Déroulement du procès

Lors du procès, vous pouvez vous présentez personnellement ;

ou vous faire assister ou représenter par un avocat ;

ou vous faire assister ou représenter par une personne majeure de votre choix munie d’une procuration écrite.

Le Tribunal saisi d’une affaire est tenu avant toute autre diligence, de notifier aux parties la faculté qu’elles ont de recourir à la conciliation, à la médiation ou à l’arbitrage .

Si les parties décident de recourir à la conciliation ou à la médiation, la procédure est suspendue et peut être reprise à tout moment à la demande de l’une des parties en cas d’échec de la conciliation. Si la médiation aboutit les parties peuvent faire homologuer leur accord.

B-   Procédures d’urgence

1.Le référé

Le président du tribunal de commerce est compétent pour prendre des mesures provisoires qui ne touchent pas le fond de l’affaire. L’une des parties dépose une requête et le Président du tribunal ou le juge délégué par lui rend une ordonnance permettant d’assigner son adversaire  Le jour de l’audience les deux parties se présentent devant le juge qui rend une décision après les avoir entendus (par exemple la demande d’une provision, les contestations de saisie, les contestations relatives à l’immatriculation au RCCM…).

2/ La matière gracieuse

Le président du tribunal est également compétent pour rendre une ordonnance sur requête à l’initiative d’une seule partie. La requête et les pièces à l’appui sont déposées au secrétariat du président qui rend une ordonnance au pied de la requête (l’ordonnance peut être proposée par les parties et accompagner donc la requête).

3/ Assignation à bref délai

A l’initiative d’une des parties, une requête est adressée au président du tribunal qui rend une ordonnance permettant d’assigner à bref délai. Le dossier est programmé à la prochaine audience utile et les débats se font à l’audience sans passer par la mise en état (résiliation de bail commercial, et tous les cas qui requiert qu’une décision rapide soit prise).

 Contestation du jugement

Les décisions rendues par le tribunal de commerce peuvent faire l’objet de  recours : L’appel, l’opposition, le pourvoi en cassation, le recours en cassation devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA).

L’appel est formé par acte d’huissier déposé par l’appelant au greffe de la Cour d’appel.  L’intimé (celui contre qui l’appel est fait) peut   faire un appel  secondaire par voie de  d’écritures avant la fin de l’instruction.

 Le délai d’appel est de deux mois à compter du prononcé du jugement s’il s’agit d’un jugement contradictoire (où les deux parties étaient présentes à l’audience et ont parlé) ou de sa notification (la prise de connaissance de la décision par l’autre partie), pour les jugements réputés contradictoires (dans le cas où l’autre partie a eu connaissance de l’assignation et n’est pas venue ou n’a pas parlé) pour les jugements par défaut (dans le cas où l’autre partie n’a pas eu connaissance de l’assignation et n’est pas venue)

L’opposition est formée par assignation signifiée à la partie adverse et déposée au greffe de la juridiction qui a rendu la décision querellée. Cette assignation doit contenir les mentions suivantes à peine de nullité :

– les noms, prénoms et domicile du défaillant (celui qui forme opposition),

– la date de la décision frappée d’opposition,

– les noms, prénoms et adresses des parties,

– les moyens du défaillant.

A la réception de l’acte d’opposition le greffier donne un récépissé du dépôt de l’opposition.

En cas d’appel, la décision de la Cour d’appel peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation (qui est soumis à un délai d’action de deux mois).

Le pourvoi en cassation est formé au greffe de la cour de cassation. Il tend à faire annuler les décisions juridictionnelles définitives en dernier ressort rendues par les cours et tribunaux. Le pourvoi est formé par requête sur papier timbré signée d’un avocat.

La CCJA est juge de cassation dans tout litige concernant les matières relevant de la législation de l’OHADA (droit commercial général, droit des sociétés commerciales…).

Elle peut être saisie d’un pourvoi en cassation contre les décisions rendues par les cours d’appel dans ces matières et dans certains cas contre les décisions rendues en premier et dernier ressort par les juridictions inférieures

En cas de cassation d’une décision, la CCJA peut évoquer l’affaire au fond c’est-à-dire se substituer au juge du premier degré, examiner l’affaire et la rejuger.

Le ministère d’avocat est obligatoire devant la CCJA.

Le recours en cassation est présenté au greffe de  la Cour de cassation dans les deux (02) mois de la signification ou de la notification de la décision attaquée par l’avocat du requérant

C-  La démarche en matière de procédures collectives d’apurement du passif

Les procédures collectives d’apurement du passif concernent les procédures préventives de conciliation et de règlement préventif, les procédures curatives de redressement judiciaire et de liquidation des biens.

La conciliation est une procédure préventive, consensuelle et confidentielle destinée à éviter la cessation des paiements (l’état où le débiteur se trouve dans l’impossibilité de faire face à ses dettes exigibles avec ses créances disponibles) de l’entreprise débitrice afin d’effectuer en tout ou partie sa restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder.

Le règlement préventif est une procédure collective préventive destinée à éviter la cessation des paiements de l’entreprise débitrice et à permettre l’apurement de son passif au moyen d’un concordat préventif (un document précisant les modalités de sauvegarde de l’entreprise).

Le redressement judiciaire est une procédure collective destinée au sauvetage de l’entreprise débitrice en cessation des paiements mais dont la situation n’est pas irrémédiablement compromise et à l’apurement de son passif au moyen d’un concordat de redressement.

La liquidation des biens est une procédure collective destinée à la réalisation de l’actif de l’entreprise débitrice en cessation des paiements dont la situation est irrémédiablement compromise pour apurer son passif.

Pour la conciliation, le Président du tribunal est saisi par requête du débiteur ou par une requête conjointe de ce dernier avec un ou plusieurs de ses créanciers. La demande expose les difficultés et les moyens d’y faire face.

La requête est accompagnée des documents suivants datant de moins de 30 jours :

une attestation d’immatriculation au RCCM ;

les états financiers de synthèse (bilan, compte de résultat…) ;

un état de la trésorerie et un état chiffré des créances et des dettes avec indication des dates d’échéance ;

un document indiquant le nombre de travailleurs déclarés à la date de la demande ;

une attestation émanant du débiteur par laquelle il déclare sur l’honneur ne pas être en cessation de paiement et précise qu’il n’est pas soumis à une procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation de biens qui ne serait pas clôturée ;

s’il y a lieu un document indiquant les noms prénoms et domicile du conciliateur proposée et une attestation de cette dernière indiquant ses compétences professionnelles ;

le cas échéant un document indiquant les noms, prénoms et domicile des créanciers qui se joignent  à la demande du débiteur et le montant de leurs créances et des éventuelles sûretés dont elles sont assorties ;

Ces documents sont datés, signés et certifiés conformes et sincères par le requérant. Dans le cas où l’un des documents ne peut être fourni ou ne peut l’être qu’incomplètement, la requête doit contenir les motifs de cet empêchement.

La procédure de conciliation est ouverte par le président du tribunal statuant à huis clos pour une durée n’excédant pas trois (03) mois mais qui peut être prorogé d’un (01) mois au plus à la demande du débiteur après avis écrit du conciliateur. A l’expiration de ces délais, la conciliation prend fin de plein droit et il ne peut être ouverte une nouvelle procédure avant l’expiration d’un délai de trois ( 03) mois.

Pour le règlement préventif le président du tribunal est saisi par une requête du débiteur ou par une requête conjointe de ce dernier avec un ou plusieurs créanciers, déposée au greffe contre récépissé. Dans la requête, le débiteur expose ses difficultés financières ou économiques ainsi que les perspectives de redressement de l’entreprise et d’apurement de son passif.

La requête est accompagnée de 14 pièces ( s’adresser au greffe du tribunal).

Les décisions rejetant la demande d’ouverture du règlement préventif ou mettant fin au règlement préventif ou rejetant l’homologation du concordat préventifs sont susceptibles d’appel (formé) par le débiteur devant la Cour d’appel dans un délai de quinze (15) jours à compter de leur prononcé ;

La décision d’ouverture du règlement préventif est susceptible d’appel par les créanciers et le ministère public (formé) devant la Cour d’appel dans un délai de quinze (15) jours à compter de la première publicité s’ils estiment que l’entreprise est en cessation de paiements ;

La décision homologuant le concordat préventif est susceptible d’appel par le ministère public et les créanciers (formé) devant la Cour d’appel dans un délai de quinze (15) jours à compter de son prononcé pour le premier et à compter de la première publicité pour les seconds.

La juridiction d’appel statue dans un délai de trente (30) jours à compter de sa saisine.    

Les décisions du président du tribunal (décision d’ouverture interdisant au débiteur de payer en tout ou partie les créances nées antérieurement à la décision d’ouverture, de faire un acte de disposition étranger à l’exploitation normale de l’entreprise ou de consentir une sûreté…) ne peuvent faire l’objet que d’opposition devant ladite juridiction dans le délai de huit (08) jours à compter de leur prononcé. L’opposition est faite par déclaration au greffe.

Les décisions statuant sur l’opposition (8 jours pour statuer) ne sont susceptibles que d’un pourvoi en cassation.

Pour le redressement judiciaire et la liquidation des biens, le débiteur en cessation de paiement doit faire une déclaration aux fins d’obtenir l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. Cette déclaration doit être faite au plus tard dans les trente (30) jours de la cessation des paiements et déposée au greffe du tribunal contre récépissé.

A cette déclaration doit être joint 11 documents datant de moins de trois (03) mois ( s’adresser au greffe du tribunal).

Le redressement judiciaire ou la liquidation des biens peut être ouverte à la demande d’un créancier quelle que soit la nature de sa créance à condition qu’elle soit certaine (sure), liquide(évalué en argent) et exigible (arrivé à échéance) ; le tribunal est saisi par voie d’assignation ;

Les décisions rendues en matière de redressement judiciaire ou de liquidation des biens sont exécutoires par provision nonobstant opposition ou appel à l’exception de la décision homologuant le concordat de redressement judiciaire ainsi que des décisions prononçant la faillite personnelle.

Par exception et en cas d’appel, l’exécution provisoire de la décision prononçant la liquidation des biens peut être suspendue par le premier président de la cour d’appel à la demande du ministère public ou du débiteur et seulement en cas de violation manifeste de la loi applicable ;

L’opposition est formée par déclaration au greffe dans le délai de quinze (15) jours à compter de la signification de la décision. Il est statué sur l’opposition dans un délai de trente (30) jours.

L’appel est formé dans un délai de trente (30) jours à compter du prononcé de la décision.

La cour d’appel statue dans un délai de trente (30) jours.

En cas de faillite personnelle ou d’autres sanctions, l’appel du débiteur ou des dirigeants est formé par requête adressée au président de la cour d’appel.

La clôture de la liquidation des biens doit se faire dans un délai de dix- huit (18) mois susceptible d’être prorogé à six (06) mois. A l’expiration de ce délai, le tribunal prononce la clôture de la liquidation des biens d’office ou à la demande de tout intéressé.